Christine Duflo vient d’un milieu modeste. A la moindre occasion, ses parents avaient l’habitude d’aller visiter, se promener, découvrir, ce qui a très tôt aiguisé sa curiosité. A l’âge adulte, elle est devenue une visiteuse d’expositions, une spectatrice de concerts, de spectacles vivants, de danse… et toujours une lectrice assidue. Avec plus de temps disponible, aller voir des expositions et s’intéresser de plus en plus à l’art est devenu essentiel.
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L’année 2001 est une année de chaos, entre maladies et la fermeture de l’entreprise qui l’employait. Une dystonie des cordes vocales l’a privée de parole pendant deux longues années avant que le diagnostic soit posé et un traitement proposé, puis à nouveau deux ans pour que ce traitement soit stabilisé.
Pour une maladie rare, ce délai est plutôt court, mais pour le patient c’est interminable. Le découpage est arrivé en thérapie, un nouveau langage permettant d’extérioriser tout ce qui s’était élaboré pendant ces années et ne pouvait pas s’exprimer. Elle savait que ça ne passerait ni par le crayon, ni par la peinture. Plutôt bonne élève en primaire, et aimant beaucoup l'école, les cours de dessin étaient un supplice et restent un réel traumatisme d'enfance.
Son histoire
Un matin de janvier 2008, tout le monde était reparti après les fêtes de décembre, c’était assez vide et déprimant. Exceptionnellement, elle a allumé le poste de télévision. Par hasard sur Arte commençait un documentaire qui présentait le travail d’une artiste anglaise qui découpait dans des livres anciens avec un cutter de précision.
Elle fut hypnotisée par le cutter, par le travail de la lame et de la main qui s’accordaient pour découper. Immédiatement, l’envie d’essayer s’est imposée. Elle est allée acheter un cutter et une petite plaque de coupe en format A4 et puiser des cartons dans le bac de tri du domicile. Le carton, c’était une matière trop difficile à découper. Cela nécessitait trop d’effort, trop de pression pour les doigts, le poignet. Après quelques tentatives, elle a essayé le papier.
C’est Comme ça que ça a commencé...
Pendant deux ans, elle fait des gammes, comme pour l’apprentissage d’un instrument.
Autodidacte, elle partait de zéro, elle avait l’envie de s’exprimer par le découpage et elle voulait expérimenter la soustraction de matière. Selon elle, enlever de la matière, c’est toujours très surprenant, on ne sait pas ce qui est réellement important, si c’est la matière qu’on enlève ou celle qu’on laisse. Au fur et à mesure, une infinité de possibilités graphiques ont émergé, d’où la nécessité d’un travail lent et intense. Manger - découper - dormir, un rythme quasi monastique s’est imposé.
Rencontrer LA MATIÈRE...
La grande étape suivante de son évolution dans son rapport au papier a été d’abandonner le trait pré-tracé. Pendant deux ans elle a tout tracé, tous les traits, toutes les géométries, avant découpage. Et un jour elle a pris sa liberté, elle a continué à découper au cutter à main levée, le cutter et la main en liberté.
Pour elle découper, c’est aussi faire le vide, faire le tri dans ses idées, c’est extrêmement puissant.
“Je m’endormais sur la table à dessin, c’est extrêmement important pour moi de travailler la nuit.” - C.Duflo
l'accès à la liberté...
Christine Duflo puise son inspiration directement dans sa mémoire, dans ses émotions et également dans la musique qu’elle écoute, tous indissociables. Son travail est en prise directe sur sa vie, il est influencé par les évènements heureux ou douloureux, et les émotions qui en découlent.
Elle découpe partout où elle va, car son matériel est très facile à emmener : une boite de lames, trois cutters, un crayon, une petite règle, et une plaque de coupe de petit format. Christine Duflo est aussi une passionnée de musique depuis toujours, elle a appris à lire et à écrire la musique très tôt, quasiment en même temps qu’elle a appris à lire et à écrire les mots.